9 juin 2023

Le JT de la beauté, seconde édition

Ah, ah, quand je pense que je voulais faire cette rubrique de manière quinzomadaire et que deux mois sont déjà passés depuis la première édition, je me reconnais bien là ! Mais que voulez-vous, je ne peux pas et profiter du soleil, et partager avec vous tous les derniers gossips de l'industrie de la beauté, il y a des priorités dans la vie et mon bronzage en est clairement une ! Mais comme je suis un mec sympa, je profite d'avoir une petite heure devant moi pour partager avec vous quelques news repérées au fil de ces dernières semaines. Pour rappel pour ceux du dernier rang qui n'écoutent jamais, cette rubrique est un rapide condensé de plein de petites choses récemment annoncées dans l'univers beauté, qui ne méritent pas forcément qu'on s'y attarde 20 ans mais justifient tout de même qu'on puisse en parler un peu. Que vous soyez juste consommateur passionné de beauté ou bien que vous travaillez comme moi dans cet univers (je sais que les deux se côtoient sur cette Planète), prenez-le comme votre synthèse de ce qu'il ne fallait pas louper. 

Je commence par une série de rachats, vous savez à force que j'ai une passion pour ce genre de news qui reflètent bien la stratégie de chaque acteur en présence. La dernière fois, je vous parlais de ceux des marques Aesop et Lady Green et ce mois-ci encore, la partie de Monopoly a continué, chacun faisant ses petites emplettes. Je passe rapidement sur le fait que Oh My Cream a racheté la licence de compléments alimentaires Combeau car je vous avoue que jusqu'au jour de cette annonce, je n'avais même jamais entendu parler de cette marque. Plus intéressant à mes yeux, la prise de participation de Caudalie qui rentre au capital de Talm, Mais si, souvenez-vous, je vous avais parlé de cette marque dans ce billet consacré aux marques de soins cosmétiques qui offraient une version plus moderne et trendy des marques dédiées à la beauté de la future maman. Je vous citais justement Talm comme l'incarnation même de la marque sortie de nulle part et qui avait réussi à s'imposer en quelques mois, faisant notamment un très bon usage des réseaux sociaux. Le rachat en soi me semble plutôt pertinent (Caudalie saura certainement ouvrir les portes des pharmacies à Talm grâce à sa force commerciale) mais ce que je trouve intéressant, c'est que ça pourrait éventuellement dessiner les contours d'un futur groupe gravitant autour de Caudalie qui aujourd'hui est finalement une des seules grandes marques à être totalement seules et indépendantes. Je me suis souvent dit qu'elle tomberait un jour dans le giron d'un énorme groupe et finalement, peut-être que le projet pourrait être autre et qu'elle se constitue elle même son propre groupe (bon, pour l'instant, Talm ne lui appartient pas totalement hein, mais c'est un début).

 

A propos de joli groupe en pharmacie, un mot sur les Laboratoires Pierre Fabre (Avène, Ducray, Klorane...) qui pour leur part ont racheté la marque MÊME (dont mon Bureau gère les Relations Presse, je le précise par souci de transparence). MÊME, c'est une marque que spontanément, je vous souhaite de ne jamais avoir l'occasion d'essayer puisqu'elle est destinée de base à accompagner les personnes qui doivent affronter un traitement anti-cancéreux. Radiothérapie, chimiothérapie, traitements médicamenteux... engendrent en effet de nombreux et indésirables effets secondaires (ongles fragilisés, peau plus sèche et sensibilisée, chute de cheveux et donc potentielles irritations au niveau du cuir chevelu...) et, aussi fou que cela puisse paraître, il n'y avait jusqu'à la naissance de la marque en 2017 aucune réponse spécifique pour tout cela. C'est le constat qu'avaient fait à l'époque Juliette et Judith, les jeunes créatrices de la marque qui accompagnaient à cette époque certains de leurs proches dans l'épreuve du cancer. Même si elle répond à des besoins spécifiques et qui se rapprochent parfois plus de la santé, MÊME reste avant tout une marque de beauté à part entière qui va surtout permettre à chaque femme et chaque homme combattant la maladie de pouvoir prendre soin de soi, de s'offrir une bulle agréable avec des produits safe qui ne vont pas l'indisposer, de préserver l'estime de soi en restant coquet.te... On y trouve du coup aussi bien des vernis à ongles, des BB crèmes, une poudre bonne mine... que, d'ailleurs, plein de personnes qui ne souffrent pas du tout d'un cancer achètent et utilisent simplement parce qu'elles sont à la recherche de produits cleans. Je trouve que le rachat est d'une totale pertinence, surtout qu'au début de l'histoire de MEME, Pierre Fabre lui avait mis le pied à l'étrier en lui faisant profiter de l'expertise de sa force de vente, ça boucle en quelque sorte la boucle. Un beau mariage en somme (ah non, ne me parlez plus de mariage d'ailleurs, depuis que j'ai vu que Léa et Emanuel de Mariés au Premier Regard se sont séparés, je ne crois définitivement plus à l'amour). 


Autre marque qui vient de changer de mains, AKANE, que vous connaissez sans doute. Il s'agit d'une jolie marque française qui, de base, communiquait beaucoup sur la pomme (Akane est le nom d'une variété de ce fruit) mais qui au fil des années a su se diversifier très intelligemment en saisissant les tendances porteuses de la beauté. Elle avait par exemple su prendre la parole sur le multi-masking, sur les éponges konjac à l'époque où ça commençait à peine à émerger, sur le spa@home ou plus récemment encore sur la cryo-beauty. Ils ont ce don pour capter les trends émergentes, c'est indéniable, au risque de brouiller parfois un peu l'ADN global de la marque et de se disperser. Depuis quelques années, la marque avait beaucoup développé son offre, au point d'avoir aujourd'hui un joli catalogue couvrant tous les besoins beauté ou presque. Peut-être un peu trop vite, surtout au regard du contexte économique, car si j'en crois cette information légale, AKANE était en redressement judiciaire depuis fin 2022, ce qui a j'imagine précipité la nécessité de pouvoir s'adosser sur un groupe. Le choix du repreneur est assez étonnant car c'est un groupe très peu implanté sur le marché français, qui à la base semble plus spécialisé sur les produits d'entretien de la maison mais qui visiblement a l'ambition d'élargir son expertise à la beauté. A voir ce que cela va donner dans les prochains mois mais je suis un peu dubitatif sur le papier (en même temps, j'étais persuadé que Léa et Emanuel allaient finir ensemble donc doit-on vraiment se fier à mon intuition ?!)...  


Tiens, à propos de marque en redressement judiciaire, on a appris le mois dernier que Lamazuna était dans cette situation. Franchement, c'est un peu un gâchis car elle a été tellement précurseur sur les questions de beauté durable, de soins solides, de circularité... et je pense qu'elle a un peu pris le bouillon avec l'arrivée simultanée de multiples marques ayant réussi à réaliser de jolies percées sur ces créneaux (Respire, Unbottled...). En même temps, il y a parfois des choix qui sont faits par Lamazuna et qui me semblent quand même étonnants : là par exemple, sur leur nouvelle gamme de nettoyants visage, il n'y a même pas le logo de la marque sur le facing, c'est quand même un parti-pris déroutant. A priori, la marque va heureusement réussir à redresser la barre, c'est le moment d'ailleurs d'acheter ses produits si vous avez envie de la soutenir et de lui permettre de continuer l'aventure (si vous voulez que Lamazuna reste dans au château, tapez 2). Plus hard que la redressement judiciaire, Taaj a pour sa part été placée en liquidation judiciaire, cette info légale expliquait que la marque cherchait un repreneur le mois passé. Là pour le coup, c'est peu de dire qu'il va y avoir du boulot car la marque est totalement sortie des écrans radars, je suis presque certain que très peu d'entre vous se souviennent de son positionnement sur la beauté ayurvédique. C'est pourtant un créneau sur lequel il y a pas mal de choses à faire, mais ça va nécessiter quand même un sacré travail (et pas mal d'investissement) pour revenir sur le devant de la scène.  


Autre rachat (purée, quelle frénésie d'achat, on dirait moi lorsque je rentre dans un Zara): les gels douche Vendôme disponibles en grandes surfaces changent de propriétaire. Ils appartenaient jusqu'alors au groupe italien Bolton (son nom ne vous dira probablement rien mais ils ont de belles marques parmi lesquelles Somatoline, Rogé Cavaillès, Sanogyl, Collistar... mais aussi Saupiquet, WC Net et Carolin, c'est vous dire si c'est éclectique !) mais passent dorénavant dans un autre groupe dont, là encore, le nom ne vous dira pas forcément grand chose : La Phocéenne de Cosmétiques. Cela vient parfaitement compléter son portefeuille de marques en  GMS puisque ce dernier a déjà Le Petit Olivier et Lovéa. Si vous vous souvenez du billet que je vous avais proposé il y a quelques temps sur le top des marques les plus vendues en GMS, peut-être vous rappelez-vous qu'il y a grosso modo 3 grandes familles de gels douche : les gourmands / régressifs (Cottage, Dop, Fa), les voyage (Tathiti, Ushuaia...) et les dermo (Cadum, Dove, Sanex). Vendôme appartient clairement à cette dernière catégorie et clairement, son potentiel est terriblement sous-exploité. A l'heure actuelle, j'ai autant envie d'acheter un gel douche Vendôme que de me coltiner l'intégrale des films de Franck Dubosc, c'est vous dire si ça m'inspire au plus haut point. Là, c'est peut-être l'opportunité de changer un peu la donne même si le groupe qui la rachète reste un "petit" groupe qui n'a pas forcément la force de frappe de ses concurrents directs, Vendôme ne va a priori pas intégrer les marques de gels douche les plus puissantes de France du jour au lendemain, c'est clair, mais elle peut clairement progresser et piquer quelques parts de marchés aux marques de son segment peau sensible. S'ils y arrivent, on pourrait même imaginer stretcher son univers vers des soins corps, des crèmes visage, du soin bébé...

 

A propos d'ailleurs de marque de gel douche qui cherche à étendre son domaine d'expertise, j'ai découvert que Cottage (mais si, vous connaissez tous ses gels douche proposés dans des flacons en forme de bouteille de lait) se lançait pour la toute première fois sur le créneau des capillaires avec toute une gamme de shampooing. Alors rassurez(vous, il ne s'agit pas d'une déclinaison pure et dure de ses best-sellers car à priori, une fois passés 7 ans, absolument personne n'a envie de se laver les cheveux avec un produit sentant le caramel ou la pomme d'amour. Non, pour ce projet, la marque a travaillé sur une toute nouvelle plateforme de marque évoquant plus la naturalité que la gourmandise. Au final, elle propose 4 shampoings s'appuyant à chaque fois sur une formule 97% d'ingrédients d'origine naturelle, un flacon 100% recyclé, une base lavante enrichie en kératine 100% végétale et des ingrédients certifiés bio (citron vert, orange sanguine, pulpe de cerise, mangue). Personnellement, je trouve la gamme plutôt bien fichue, il n'y a clairement rien d'absolument révolutionnaire / incroyable (en même temps, on ne vas pas réinventer la roue sur du shampoing) mais c'est propre et bien exécuté, ça peut trouver sa place. Et je peux vous dire que c'est un peu le seul lancement qui a attiré mon attention ces 15 derniers jours, rien vu de bien folichon par ailleurs.

 

Côté retail par contre, il y a une initiative que j'ai trouvé hyper sympa et intelligente : l'ouverture de La French Beauty, un magasin qui fédère pas moins de 38 marques indépendantes françaises au sein d'une même boutique idéalement située dans Le Marais. C'est tellement une bonne idée qu'on se demande pourquoi personne n'y a pensé avant ! Ouvrir une boutique pour une seule marque demande des investissements plus que conséquents (les prix des loyers parisiens, la décoration, du personnel pour assurer une grande amplitude horaire...) et lorsque vous êtes une marque seule, c'est sûr que c'est un bel écrin mais quand même plus que difficile à rentabiliser. Là, lorsque vous divisez tous les frais par 38 mais que vous pouvez quand même exposer les 15 produits de votre marque, c'est franchement tout bénef. Pour nous consommateur, c'est cool car ça permet de voir plein de jeunes pousses au même endroit. Pour les vrais mordus de beauté que nous sommes, c'est franchement enthousiasmant. La boutique (qui était auparavant celle de la marque Huygens avant si je ne me trompe pas) est jolie (à part cet abominable logo vert  limite fluo qui pique les yeux), c'est sobre mais propre, fonctionnel et accueillant. Le truc que je n'ai pas compris, c'est est-ce que c'était un concept testé pour quelques mois ou bien est-ce qu'on a déjà l'assurance qu'il reste de manière pérenne et qui sait qu'il s'en déploie même quelques autres dans plusieurs grandes villes de France. Affaire à surveiller en tout cas mais pour le coup, c'est une manière pour les jeunes marques de reprendre un peu la main face aux magasins classiques dans lesquels ils sont d'ordinaires revendus et qui peuvent parfois leur imposer des commissions conséquentes, de coûteuses animations et PLV... Bien joué La French Beauty, l'union fait la force ! 

 

Un mot sur les égéries pour finir car on a des annonces à tour de bras ! Moi perso, je m'y perds, je ne sais plus qui est qui, qui fait quoi, et souvent lorsque je vois des noms d'ambassadeurs passer, je ne sais même pas de qui il s'agit (l'approche de la quarantaine, le gouffre générationnel est en marche, c'est terrible...). Je commence par Bilal Hassani qui devient donc égérie NYX. Bon, personnellement, j'avoue ne pas lui trouver un grand talent (il a l'air hyper sympa en revanche) et je trouve qu'au-delà du personnage et de ce qu'il incarne, il n'a quand même pas une carrière fort bouleversante. A mes yeux, c'est l'incarnation de notre société (l'image, l'image, l'image... et pas grand chose derrière) mais pour le coup; il colle parfaitement avec NYX (cible jeune, inclusive, au look affirmé.) donc je ne peux rien d'autre que "c'est plutôt bien vu". Du côté de Chanel, on sait du coup qui va reprendre le flambeau de Gaspard Ulliel sur le Bleu de Chanel (un de mes parfums préférés, je ne m'en lasse pas malgré les années) : Timothée Chalamet. Vous allez dire que je suis pénible aujourd'hui mais pour le coup, je n'en suis pas non plus grand fan même si là en revanche, impossible de nier son talent et encore moins sa carrière qui parle pour lui. J'ai trouvé par contre le teasing posté sur le YouTube de Chanel terriblement ennuyant, j'attends de voir la première campagne mais pour l'instant, déçu. Valentino Beauty enfin s'offre les services de l'actrice anglaise Florence Pugh. Je l'avais adorée dans Don't Worry Darling avec Harry Styles (vous l'avez vu ?) mais j'avoue n'avoir pas vu ses autres films (mais j'irai clairement la voir dans Oppenheimer, film de Christopher Nolan oblige) donc je ne la connais pas plus que ça. 9 millions de followers sur Instagram, c'est néanmoins pas mal même si ça ne restera pas la prise de l'année non plus.

Bref, ça bouge toujours autant sur la Planète Beauté et il faut bien s'accrocher pour tout suivre ! Quelles sont les infos que vous avez retenu de votre côté, ou bien les produits récemment lancés et qui ont piqué votre curiosité ?

21 mai 2023

Pour le pire et le miel'leur!

Pfffffiouuu, j'ai été pris dans un mini-tourbillon ces dernières semaines mais je sors enfin un peu la tête de l'eau ! Pour vous la faire courte, j'ai été un peu malade quelques jours, eu pas mal de taf avec les jours fériés (très sympas les lundis off hein, j'adore le concept mais alors derrière, faut sérieusement cravacher), puis fêté mon anniversaire et suis enfin allé passer quelques jours au Portugal... Mais cette fois, c'est bon, me revoici avec dans ma besace une petite réflexion - enfin, "petite", vous me connaissez, j'ai toujours un peu de mal à faire dans le succinct - sur la cosmétique vegan. C'est un sujet sur lequel je voulais me pencher depuis un moment et c'est en lisant un article intéressant dans M Le Magazine du Monde que je me suis décidé à me lancer. D'ailleurs, et pour être tout à fait précis, je ne vais pas forcément parler de la cosmétique vegan dans son ensemble mais plus spécifiquement de la place du miel dans nos pots de crème. Avant d'en arriver là, un rappel rapide tout de même sur la cosmétique vegan car certaines choses doivent être précisées car je vois, et notamment quand je discute avec certains de mes amis ne travaillant pas dans l'industrie de la beauté, que pas mal d'amalgames demeurent encore. Donc déjà et pour poser les bases, noooooooooon je ne regrette rien ce n'est pas parce qu'un produit est vegan qu'il est naturel. Je vous colle du pétrole, des huiles minérales, de la paraffine et des paillettes dans un pot de crème, je pourrai sans doute obtenir la certification vegan mais ne serai pas du tout naturel pour autant. 

Donc pour rappel, vegan, c'est simplement que mon produit ne contient absolument aucun ingrédient d'origine animale, rien de plus, rien de moins. Dans l'absolu, je pense que 90% des produits de beauté n'en contiennent pas et le sont de facto, au final tout le monde ou presque pourrait s’enorgueillir de ça assez facilement. Parmi les quelques ingrédients qui peuvent empêcher un soin d'être vegan, on peut par exemple citer le lait d'ânesse, le carmin issu de cochenilles (des insectes qu'on tue en les écrasant pour récupérer le pigment rouge composant la majeure partie des rouges à lèvres), la bave d'escargot... et donc tous les produits issus de la ruche, à commencer par le miel bien entendu mais aussi la gelée royale, la propolis, la cire... Je vous avoue que pour ma part, et jusque très récemment encore, je ne comprenais pas trop cette défiance à l'égard des actifs issus de la ruche et me disais : " mais bordel, le miel, les abeilles en font naturellement donc pourquoi cela serait un problème que de le récupérer afin de profiter de son pouvoir cosmétique avéré ? ". Autant je conçois parfaitement qu'on ne veuille pas voir des insectes écrasés pour qu'on puisse se badigeonner les lèvres de rouge, autant j'avais du mal à capter où était le problème avec le miel. Sauf qu'entre temps, et parce que j'aime bien comprendre les choses dans la vie, je me suis renseigné sur le sujet... 

Si on écoute le discours des gens qui entendent vivre selon les préceptes purs et durs du veganisme, la consommation de miel à proprement parler est déjà une offense faite aux abeilles et un vol manifeste de leur travail. On peut en sourire si on le souhaite mais en même temps, je trouve pour ma part que ça fait plutôt sens. Si on réfléchit un instant, certes les abeilles produisent en effet spontanément du miel mais à aucun moment, leur projet de départ n'était qu'on vienne le leur dérober. Elles le font pour elles, parce qu'elles en besoin pour leur alimentation, parce que c'est ainsi que cela se passe dans une ruche... mais pas en se disant " tiens, si on produisait tout ce bon nectar pour qu'on vienne ensuite nous le chaparder ". Le problème à mes yeux, et ce que j'ignorais jusqu'il y a peu de temps encore, c'est surtout les conditions dans lesquelles cela peut être réalisé. Au final, c'est comme pour tout élevage : il y a ceux qui font les choses dans les règles de l'art, vont prendre soin de leur bétail et se montrer respectueux tout au long de sa vie et lors de son abattage. Puis les autres. Alors certes, au final me direz-vous, la bête est tuée et consommée mais j'imagine qu'on est tous d''accord pour s'accorder sur le fait qu'on préfère déguster un bon steak en direct d'un producteur dont on connait les méthodes respectueuses que d'une marque dont l'abattoir va se retrouver pointé du doigt par Hugo Clément dans un reportage de l'association militante L214. 

Et bien il faut bien se dire que c'est exactement pareil en cosmétique, et que l'appellation "miel" sur un pot de crème ou un shampoing peut cacher des réalités bien différentes. Avant de vous en parler plus en détail, un mot quand même sur certaines dérives dont il faut bien avoir conscience quant à la production de miel. Je l'ignorais pour ma part mais finalement, et comme partout où le capitalisme est de la partie, il y a une obsession de la surproductivité. Dans les ruches par exemple, il n'est pas rare que la Reine des abeilles soit délibérément butée au bout d'une année seulement (alors que son espérance de vie est normalement de 4 à 5 ans) parce qu'elle n'était plus assez prolifique. La récolte du miel par l'apiculteur peut se faire selon des méthodes "traumatisantes" pour les abeilles, comme par exemple lors de l'enfumage de la ruche. Il y a aussi le problème de croisements génétiques (mais comme avec les fruits et légumes finalement) qui permettent d'obtenir des abeilles plus dociles et plus productives à qui on va pouvoir faire produire un maximum de miel, en faisant en quelque sorte l’esclave de l'homme. D'après ce que j'ai cru comprendre, lorsqu'on tente de récupérer leur miel, les abeilles vont avoir tendance à défendre leur territoire sauf que, et malheureusement pour elles, lorsqu'elles tentent de piquer, elles y laissent la moitié de leur abdomen et meurent. On pourra objecter que " ce sont des abeilles et qu'on ne sait même pas si elles ont véritablement une conscience " mais pour ma part, je trouve qu'on pourrait faire preuve d'un peu d'humilité face à un animal qui fait preuve de tant d'intelligence dans l’organisation de sa "société" et surtout qui est si essentiel à notre survie via le mécanisme de pollinisation qui repose sur leurs petites épaules (enfin, leurs petites ailes en l'occurrence).

Bref, une fois que je me suis renseigné sur le sujet du miel et que j'ai découvert tout ça, j'avoue que ça m'a fait réfléchir et que, pour la première fois, je me suis dit qu'il y avait en effet potentiellement un problème avec l'usage du miel en cosmétique. Après, c'est comme tout dans la vie, il faut savoir faire preuve de bon sens et de discernement... 3615 my life mais pour ma part, je consomme pas mal de miel (je ne sucre plus mes yaourt avec du sucre blanc mais uniquement avec du miel) et je sais que beaucoup de miels alimentaires qu'on peut trouver dans le commerce sont soient coupés avec d'autres ingrédients ou simplement de piètre qualité donc j'essaie à chaque fois d'acheter les miens dans des marques dont je me suis assuré du sérieux au préalable. Du coup, j'ai eu envie d'investiguer sur la provenance du miel qu'on retrouvait au sein de nos soins cosmétiques et je vous avoue que le sujet n'est pas évident car finalement, on en trouve dans un nombre faramineux de produits, c'est vraiment un actif incontournable de la beauté.


Au début, j'ai porté mon attention sur les marques dont le miel est vraiment l'ingrédient star, à tel point qu'il peut même être mis en avant dans le nom d'une gamme ou d'un produit. Je pense par exemple à l'incontournable gamme Abeille Royale de chez Guerlain qui utilise, après enquête de votre humble serviteur; un miel provenant de l'ile d'Ouessant en Bretagne et récolté dans les règles de l'art. On peut toujours suspecter que ce soit simplement des engagements de façade mais pour le coup, j'ai l'impression au contraire qu'ils sont vraiment profondément désireux de bien faire les choses, à tel point d'ailleurs que la défense des abeilles est devenu un sujet central sur lequel la Maison prend mille initiatives comme elle l'explique ICI. Cela passe par bon nombre d'actions très concrètes, passant de la pédagogie dans les écoles primaires à la formation d'apicultrices engagées en passant par l'adhésion à une organisation reconnue pour définir les pratiques d'approvisionnement éthique en ce qui concerne les ingrédients issus de la biodiversité. Bref, tout me semble OK de ce côté. 

J'ai cherché ensuite du côté de chez Nuxe et de sa mythique ligne Rêve de Miel. Pour info, la marque n'a pas répondu à mes questions donc j'ai essayé d'aller à la chasse aux infos sur leur site où on nous explique que  " NUXE a sélectionné notamment du miel de lavande, un miel label rouge et IGP de très haute qualité récolté en Provence au sein d’une entreprise familiale engagée. Son origine géographique et florale est certifiée par analyse ADN, afin de garantir une qualité constante.". Il y a certains éléments rassurants (c'est du miel bio et français, ce qui est déjà important) mais je trouve quand même que ça mériterait plus de précisions. Perso, dans leur texte, c'est le "notamment" qui m'inquiète un peu. Oui, il y a ce miel qui semble honorable mais est-ce qu'il y en a d'autres ? Lorsqu'on imagine les volumes de vente conséquents que doit représenter cette ligne iconique de la marque, j'ai du mal à croire que ça ne puisse venir que d'un seul petit apiculteur de Provence. Est-ce qu'une filière plus globale a été mise en place ? On est un peu dans le flou. Côté action bienfaisante, on nous dit que Nuxe " collabore avec la société Un Toit Pour Les Abeilles et parraine par son intermédiaire des ruches implantées dans les Vosges pour donner naissance à de nouvelles colonies et contribuer ainsi au maintien de l’espèce ". Mieux que rien me direz-vous (elle n'est obligée de rien donc c'est déjà très bien que la marque fasse cela) mais pour moi, c'est un peu comme lorsqu'on nous dit qu'on va replanter un arbre en Amazonie, j'ai l'impression que cela reste un peu léger, que c'est l'engagement un peu facile et qui ne mange pas de pain.

 

J'ai zieuté ensuite du côté des marques spécialistes du miel, et là pour le coup, c'est plus surprenant. Je commence par exemple par Melvita, dont je rappelle tout de même que le nom même est la contraction de Mel en référence au miel et de Vita, qui signifie vie en latin (oui, rien à voir avec Vitaa et sa copine Mel' qui va passer sa journée dans le noir !). En allant sur leur site et en cherchant les engagements de la marque, je pensais forcément tomber sur quelques infos détaillant l'origine du miel qu'ils utilisent et d'éventuels actions que la marque mettrait en place pour contribuer à la sauvegarde des abeilles. Imaginez du coup ma surprise en découvrant que finalement, l'action majeure que la marque met en avant concerne... la défense des tortues en Nouvelle-Calédonie. Étonnant, mais pas tant que ça car quelques lignes plus bas, on nous explique que "Melvita a à cœur de proposer des formules de qualité, naturelles, certifiées bio et respectueuses de notre peau mais aussi de la planète. Dans ce sens, elle souhaite proposer, dès que possible, des soins excluant tout ingrédient d’origine animale, c'est à dire, vegan.". Vous m'excuserez mais pour moi, c'est quand même une petite révolution, cela veut donc dire que la marque va totalement désinvestir le créneau du miel ? J'ai regardé et à date, il reste 17 références sur l'eshop qui en contiennent mais c'est vrai que dans tous les lancements les plus récents, il n'y en a plus, la marque s'appuie sur d'autres ingrédients végétaux avec des fleurs, de l'argan... pour se positionner comme une marque de beauté naturelle sans plus évoquer la ruche.

Je trouve ça intéressant et ça m'amène à une question : est-ce que l'émergence de la tendance vegan (qui va progresser selon les cabinets d'étude de 6% par an jusque 2030) va pousser certaines marques, même celles ayant pendant longtemps prospéré sur les bienfaits de la ruche, à se détourner de cet ingrédient ? Dans l'article du Monde dont je vous parlais en préambule, j'apprenais par exemple que Sanoflore avait aussi choisi d'abandonner totalement le miel de tous ses produits, alors qu'elle avait pourtant certaines références dont il était la star, comme par exemple Miel Suprême. J'ai pu échanger avec la marque à ce sujet (pour le coup, eux ont été d'une grande transparence) qui m'expliquait que  " dès 2020, l’évolution de la réglementation Ecocert, charte de formulation Bio la plus exigeante au niveau européen, a mené Sanoflore à prendre la décision de retirer les ingrédients d’origine animale ou dérivés, soit les produits tels que le miel, la cire, la gelée royale pour les abeilles. Cette nouvelle version du Référentiel est mise en application au 30 mai 2023. ". Au final, la marque a donc twisté son actif à base de miel pour une alternative associant Edelweiss bio, collagène, huile essentielle de Thym du Vercors qui présente peu ou prou les mêmes pouvoirs anti-inflammatoires et régénérants. 

Je trouve cela très intéressant car si je comprends bien, cela voudrait donc dire que à compter du 30 mai (c'est à dire demain ou presque), tous les produits qui contiendraient des ingrédients issus de la ruche ne pourraient plus forcément prétendre au label Ecocert ? Ça serait une petite révolution. J'ai interrogé à ce sujet Muriel Bourges Reberga qui travaille chez Ballot-Flurin, une marque française qui propose des compléments alimentaires à base d'ingrédients de la ruche mais aussi des soins cosmétiques de grande qualité. Elle me dit ne pas être au courant de cette éventuelle législation à venir mais défend pour sa part le travail autour de l'api-beauty en expliquant que Ballot-Flurin veille à travailler selon les préceptes d'une "apiculture douce" qui puisse être aussi respectueuse que possible des insectes. Un exemple concret : lorsque ses apiculteurs vont venir prélever le miel des ruches, ils vont prendre ce qu'ils considèrent simplement être en excès, là où d'autres fournisseurs de miel moins regardants auront tendance à prélever tous le miel produit par les abeilles, ne leur laissant rien alors qu'elles ont en pourtant besoin. 

Dans leur optique, les abeilles ne sont pas des vaches à lait et doivent être respectées. Muriel me disait qu'il fallait aussi regarder avec vigilance la véritable concentration en miel dans les soins cosmétiques. C'est très juste car souvent, on nous le met en avant sur le visuel d'un produit de manière à ce qu'on aie l'impression qu'il s'agit d'un ingrédient majeur alors qu'il est en fait présent de manière presque anecdotique. Pour le coup, dans leur catalogue, on retrouve certaines références comme la crème de l'apicultrice qui en compte jusque 10% dans sa composition, ce qui est vraiment conséquent. Mais le truc, c'est qu'il s'agit d'une entreprise à taille familiale et qui connait une croissance continue certes, mais douce, ce qui leur permet de maintenir ce haut standard de production. Est-ce qu'il est possible d'en faire autant lorsqu'on est une multinationale de la beauté ? 


C'est là encore ce que je me suis demandé en allant fouiner du côté des marques en grandes surfaces et en partant d'un constat simple : sur des produits vendus à petits prix, on est sans doute contraint de faire preuve de vigilance sur le tarif des matières premières alors est-ce que cela se ressent dans la qualité du miel utilisé ? J'ai d'abord porté mon attention sur La Provençale qui nous explique que  " Pur et d’une qualité exceptionnelle, le Miel de Fleurs Bio IGP Provence de notre apicultrice Nadège possède des propriétés apaisantes et adoucissantes "... et c'est tout ! Bio + IGP + origine France, c'est déjà un bon début je vous l'accorde, mais un peu léger à mon sens, surtout que cela ne s'accompagne d'aucune autre action spécifique en faveur des abeilles. Et "le miel de Nadège", c'est gentil sur le papier et cela donne certes un côté humain / proximité à la production du miel mais bon, sur une marque qui j'imagine vend des dizaines de milliers de produits par an (ce qui est mérité car elle est canon et hyper bien brandée), j'espère juste que cette dame a un sacré paquet de ruches pour suivre la cadence...

Garnier aussi met beaucoup le miel à l'honneur dans ses produits, c'est l'ingrédient vedette notamment de sa franchise Ultra Doux Trésor de Miel. Là aussi, la marque n'a pas répondu à mes questions donc je reste un peu dans le flou et ne peux dire avec précision ce qu'il en est de leur sourcing. C'est dommage car j'ai l'impression en plus qu'ils font pas mal d'efforts en la matière, c'est en tout cas ce qu'on peut imaginer puisque leurs packs font mention à plein de choses enthousiasmantes, du genre "miel d'acacia sourcé équitablement et dans le respect des abeilles", "cire d'abeille issue d'un sourcing responsable", soutien aux associations et programmes The Bee Conservancy et Bee Welfare Program... Pas mal du tout non ? Un truc qui m'a en revanche grandement interpellé sur les produits Garnier au miel : ils sont certifiés Cruelty Free. Alors oui, ce label est là pour attester qu'aucun ingrédient de ce produit n'a été testé sur les animaux mais n'est-ce pas un peu paradoxal, si on considère que la simple production de miel relève en quelque sorte d'une certaine forme d'agression et de violence envers les abeilles, que de pouvoir se prévaloir de cette certification "sans cruauté" ? Je pose la question.  

 

Toujours en grandes surfaces, j'ai remarqué aussi toute une gamme Gelée Royale chez Dessange mais là aussi, malgré mes demandes à la marque, je ne suis pas parvenu à obtenir d'informations sur sa provenance. Idem chez Cadum pour sa Crème Douche Surgras au Miel de Fleurs, on ne saura rien de plus à son sujet. J'ai posé aussi la question chez Le Petit Marseillais mais là aussi, je n'ai pas obtenu de réponse. Un manque de transparence qui pour ma part ne tend pas forcément à me rassurer et d'ailleurs, le simple fait qu'aucune mention à l'origine du miel ne soit faite sur ces différents produits tend à me faire penser que c'est parce qu'il n'y a pas grand chose à valoriser. Si vous connaissez d'ailleurs des gens qui bossent chez ces marques et que vous pourriez interroger pour moi sur le sujet, ce serait génial ! Ne croyez pas que cette tendance à l'opacité ne concerne que les marques petits prix, pas du tout. Sur le site de Leonor Greyl par exemple, impossible d'avoir une info sur le sourcing du miel présent dans le Shampooing au Miel alors qu'à 27 euros, on pourrait légitimement espérer un ingrédient de haute qualité. Pas mieux chez Kiehl's non plus.

Je sais que ce billet est déjà très long mais vous conviendrez que le sujet est important et mérite qu'on prenne le temps de s'y intéresser posément. J'ai bientôt fini de toute façon, je voulais simplement conclure en alertant sur les fois où le miel est mis en avant mais dans des catégories de produits dans lesquelles on ne va jamais se poser la question de savoir d'où il vient et est-ce que sa culture est respectable (enfin, sauf moi l'empêcheur de tourner en rond !). Un exemple concret ? Dans les colorations Casting Crème Gloss de L'Oréal Paris, le soin reconstituant qu'on applique une fois la coloration terminée est à base de miel, un ingrédient qui est d'ailleurs bien mis en valeur sur le facing du produit. Cette fois, on n'a absolument aucune information à son sujet, et je ne pense pas à mon avis qu'il s'agisse d'un miel bio, français et IGP. Bien évidemment, j'ai posé la question à la marque et je vous le donne en mille... je n'ai pas eu de réponse là encore (purée, j'en aurai pris des vents en préparant ce billet !). Et je vous fais grâce de la cire qu'on retrouve dans tous les produits dépilatoires, je n'ose imaginer d'où elle vient et dans quelles conditions elle a été obtenue. Muriel chez Ballot Flurin m'expliquait d'ailleurs qu'il y avait tout un business de la cire, c'est visiblement là aussi un sujet qui mériterait de s'y attarder. J'ai interrogé mon client Acorelle à ce sujet mais n'ai pas encore obtenu de réponse et impossible de rentrer en contact avec les leaders du marché Veet et Nair pour avoir leurs éclairages sur le sujet (là aussi, si vous connaissez des gens chez eux, je suis preneur).

Conclusion de tout ça me demanderez-vous ? De mon point de vue, l'idée n'est pas du tout de bannir le miel de nos routines beauté, c'est un ingrédient qui est utilisé depuis des temps immémoriaux et qui a parfaitement fait preuve de son efficacité à travers son appréciable pouvoir cicatrisant / réconfortant. Ce serai du coup fort dommage de se passer de ses services mais en revanche, et ce que je vous invite à faire si je peux me permettre un conseil, c'est de vous interroger bien davantage sur la provenance du miel au cœur des produits cosmétiques que vous utilisez. C'est nous en tant que consommateurs qui pouvons demander des comptes aux marques et faire en sorte que ces dernières misent sur un approvisionnement plus respectueux des abeilles. Prenez le temps de décortiquer les étiquettes, regarder sur les sites des marques quels sont véritablement leurs engagements en la matière... Cela vaut en beauté pure et dure mais on pourrait aussi étendre la réflexion aux compléments alimentaires vitamines où il y a aussi à boire et à manger en matière de produits de la ruche. Bref, faîtes preuve de vigilance et ne mésestimez pas ce qui, j'ai l'impression, est quand même un vrai sujet de réflexion. Aviez-vous déjà pris le temps de vous interroger sur tout ça ? Vous êtes consommateurs de produits cosmétiques au miel, est-ce un ingrédient que vous favorisez ou pas plus pas moins ? Et après lecture de cette loooooongue tirage, quel est votre avis sur le sujet, avez-vous des points de précision à apporter ?  

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